Ma mémoire d'éléphant me porte depuis toute petite. Mon père me l'a transmise.
Comme lui, je peux encore 20 ans après me souvenir d'un repas de famille, quelle date, quel lieu, qui était présent, une ou deux anecdotes, parfois le menu, la lumière, l'humeur ou le placement des uns et des autres.
Je revois toutes les salles de classe de mon enfance, toutes mes vacances, toutes mes rencontres, je peux les situer précisément dans l'espace-temps de ma trajectoire.
Je passe une fois à un endroit et, si je prête attention à mon chemin, je m'en souviendrai sans peine pour mon prochain passage.
Je me souviens du prix des articles que j'ai achetés ce matin. Je m'impatiente à faire réciter son vocabulaire allemand à Lili qui a hérité de la mémoire de poisson en bocal de Mari Charmant - à moi il suffit de photographier dans ma tête la page de son livre pour en mémoriser les mots même si je ne les ai jamais rencontrés avant.
J'ai réalisé seulement récemment que la plupart des gens vivent très bien sans s'encombrer de tout cela. Mais pour moi, si un matin j'ai la tête dans le brouillard pour cause de migraine, fatigue, déprime, virus ou autre, c'est le drame. C'est comme si ma personnalité se désagrégeait.
Mais aussi, pour moi, aventurer mon esprit dans des espaces non construits fidèlement à ma mémoire est toujours surprenant. Dessiner un mandala, écrire un papyrus. Surprenant mais libérateur aussi.
Et d'ailleurs, je me demande quoi faire de cette mémoire, concrètement, utilement? Alors que les réseaux sociaux mémorisent sans relâche les connections, humeurs, faits et gestes de tout un chacun, alors qu'il me suffit de sortir l'iphone du sac à main à tout moment pour me connecter sur wikipedia et trouver l'information dont j'ai besoin, à quoi mes neurones magasiniers peuvent-ils bien servir encore?
....à écrire...raconter...nous faire rêver....si je l'avais , cette mémoire , je saurais quoi en faire! biz
Rédigé par : aloun | vendredi 14 janvier 2011 à 17h46