Je suis revenue. Enfin, je crois... la réalité est devenue relative. Comme si j'avais en une semaine expérimenté, ressenti, ce que montre la physique moderne. La matière est une illusion. Le temps aussi. L'histoire a pris un autre sens pour moi. Et je suis revenue découragée par la liberté que je cherchais.
Imaginez que vous habitez dans une grotte sans lumière. Et un jour vous sortez. Vos yeux vont brûler d'abord. Et quand vous saurez enfin les ouvrir sans être aveuglés, vous aurez le vertige, devant les grands espaces colorés...
J'ai appris l'humilité. Tant de travail encore pour devenir vraiment moi. La tentation m'est venue de lâcher-prise jusqu'au bout... de me laisser porter par la lumière... ce serait si facile. Mais ce n'est pas le moment.
L'autre tentation m'est venue de tout oublier, de tout brûler, dans une immense colère, l'impression que ce voyage n'était pas pour moi, que je n'ai pas été assez avertie du risque de non-retour. Mais je n'étais pas seule, nous étions une quinzaine, j'ai reçu et j'ai donné, maintenant du coup je ne peux pas effacer notre vécu collectif, et les photos sont trop belles...
J'ai intégré l'expérience dans mon corps physique avant et après le voyage. Les machines qui me jouent des tours, vertiges, plexus noué, insomnies, manque d'appétit... Et mes plus grandes angoisses existentielles m'ont sauté à la figure. Ne pas exister... ne pas être dans l'univers de l'autre... en quittant mon travail cet été, en m'échappant une semaine de mon quotidien réel, en cherchant presque caricaturalement ma place dans ce groupe d'inconnus, j'ai créé mes propres angoisses. J'ai compris pourquoi je suis perdue et en quête désespérée de sens; je n'arrive pas à dépasser certains blocages et je continue de créer les situations qui me les révèlent.
C'est décourageant.
Je vais laisser l'intégration se faire, doucement. C'était trop pour moi d'un coup comme cela. Je dois me retrouver, reconstruire ma lumière intérieure, car là franchement, je me sens complètement éparpillée.
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