Dans le diocèse où j'ai grandi, dans les années 80, c'est à 15 ans révolus que l'on pouvait préparer le sacrement de la confirmation. A cet âge, ne restaient plus guère que les enfants de bonnes familles pratiquantes, plutôt bourgeois et quasi tous scolarisés dans le privé, pour qui la confirmation était une évidence comme la messe du dimanche. Il y avait aussi toutefois quelques ados plus atypiques, par exemple de rares (nous étions en Bretagne) immigrés latins étonnés de l'extrême laïcité, voire de l'anti-cléricalisme, de la culture française, et impatients d'imiter leurs parents et cousins confirmés dans la foulée de la communion solennelle. Et bien sûr nous étions aussi quelques-uns à venir dans une démarche plus individuelle, curieux électrons libres à la recherche d'un engagement spirituel personnel ou d'un approfondissement de notre bonne foi d'enfant.
La préparation se faisait sur une année sous forme principalement d'ateliers mensuels le samedi après-midi: études de texte, rédactions de poèmes ou de courtes histoires, dessins, chansons, discussions et débats, sur un sujet tel que la vie en société, notre projet de vie, notre engagement de chrétien, etc. Bien sûr, le thème central auquel tous ces sujets revenaient finalement était le Saint Esprit, divin porteur de sens, de sagesse et de force dont tout baptisé bénéficie des premiers bienfaits, mais que la confirmation devait renforcer ad vitam aerternam.
J'étais ravie de cette notion bien abstraite qui exprimait enfin les sentiments, sensations, émotions du divin que je ressentais, et qui étaient si difficiles à décrire avec des mots de tous les jours. Je crois que je devais être un peu mystique dans le fond!
De plus, j'étais heureuse dans ce groupe comme nulle part ailleurs, loin de mes doutes et questions existentielles. L'ambiance y était beaucoup plus chaleureuse qu'au lycée, et c'était un espace de construction personnelle et de liberté loin des parents, même si des adultes nous encadraient, car la plupart était à peine plus âgés que nous - animateurs MEJ, séminariste, étudiants...
La cérémonie devait avoir lieu en novembre. Le dernier temps fort de la préparation était, en septembre, une retraite d'un week-end dans un château en bord de mer. En deux jours, le groupe finissait de sceller son "Esprit" au moyen d'une randonnée-jeu de piste et de réflexion, de repas et d'une belle veillée en commun animée de guitares et chants, d'ateliers approfondis, et d'une célébration.
Et j'eus pour ma part la chance supplémentaire de vivre là-bas une jolie expérience personnelle, de celles qu'on garde bien au chaud dans son carnet de vie. Moi qui suis une vraie marmotte impossible à sortir de dessous la couette au petit matin, ce dimanche-là dans le dortoir, je me réveillai au petit jour, en grande forme et pleine d'allant. Comme tout le monde dormait encore, je décidai de sortir doucement pour aller marcher au dehors.
C'était un de ces beaux matins d'automne, à peine brumeux, et mes pas me conduisirent naturellement vers la plage en contrebas pour admirer le lever du soleil, car elle donnait à l'Est. Sans doute était-ce une grande marée montante d'équinoxe, car de larges vagues régulières se succédaient bien haut sur la plage. Et tandis que je leur faisais face, le soleil s'éleva, magnifique sphère de lumière encore mêlée aux rouleaux d'embruns et d'écume, dardant aux travers de l'eau des rayons aux couleurs chaudes qui me semblaient ainsi directement adressés. Le vent dormait encore, et tout l'air de ce matin respirait la sérénité. Je restai là de longues minutes à respirer, à vivre simplement, parfaitement heureuse d'être en ce lieu-là à ces instants-là.
Quel moment magique! il n'en fallait pas plus pour achever de renforcer mes convictions les plus positives. Je crois que pour un peu, j'aurais vu l'Esprit-Saint partout, si je n'avais pas avant tout le caractère à bien garder les pieds sur terre dans ma vie quotidienne. Evidemment, je me réjouissais vraiment de vivre l'étape ultime, ce fameux sacrement qui finaliserait mon parcours spirituel dans la foi catholique, l'affermissement de la confirmation avec la transmission des sept dons de l'Esprit, le jour J... qui fera l'objet du prochain épisode!
Passionnant Kerleane, continue.
Bise
Carole
Rédigé par : Uneplacepourmoi | mercredi 10 janvier 2007 à 05h49
Merci pour cet instant « magique » qui me réveille et m’oblige à prêter attention. Nous sommes si nombreux à ne pas voir « la grandeur de tout cela ». Il suffit de regarder autour de nous pour nous rendre compte que tant nous est donné… mais que nous apprécions si peu.
Rédigé par : le refuge | jeudi 11 janvier 2007 à 12h41