Suite à ma confirmation, j'ai continué ma recherche spirituelle. L'expérience m'avait tant convaincue que je m'étais engagée pour encadrer la préparation des générations suivantes. Je participais aussi à différents rassemblements de jeunes catholiques - fêtes diverses, pélérinages.
Sur un plan plus personnel, je retournais souvent me recueillir dans l'église de la confirmation, car elle était au milieu des 2km séparant le lycée de ma maison, et c'était une étape pour moi pour méditer mes soucis de la journée et retrouver une certaine sérénité entre ces deux sphères de relations aux autres -mes camarades et les profs d'un côté, ma famille de l'autre - qui m'étaient alors si compliquées.
Mais peu à peu, je devenais adulte. Après le bac, j'ai quitté la maison pour aller étudier à quelques 200km. C'est en procédant par élimination que j'avais choisi ma voie: je voulais un métier avec des débouchés, j'étais trop timide pour faire du commerce, trop phobique à la vue du sang pour faire médecine, et comme j'étais bonne en maths et en physique, le choix d'une école d'ingénieur s'était imposé assez naturellement.
C'est alors que j'ai commencé à faire le grand écart.
D'un côté, la Foi: cette conviction intérieure, ce vécu si fort derrière mes pas d'alors, et pourtant indicible. Croire...
De l'autre côté, la Science: celle qu'on m'inculquait au jour le jour - physique, chimie, algèbre, mécanique - mais surtout l'esprit scientifique dans lequel je baignais du matin au soir dans ce milieu d'étudiants passionnés de maths, de sciences, de technologie; s'interroger, proposer des hypothèses, expérimenter, valider ou invalider, conclure; mais aussi, échanger, discuter, critiquer. Réfléchir...
Il est difficile de résumer en un paragraphe les heures innombrables et le plus souvent fort avancées dans la nuit, parfois même à la veille d'examens ce qui donnait encore plus de piment à l'expérience, que j'ai passées en résidence universitaire à discuter sans fin de la nature de la conscience et la capacité de l'homme d'en créer une artificielle, ou de la transférer dans une machine, du chat de Schrödinger, de la théorie du chaos et des fractales, de la peur de la mort, du mystère de la foi, de l'existence de Dieu... Mes camarades étaient tous devenus agnostiques, voire athées, au cours de leur maturation, et moi avec ma bonne foi catholique, j'étais un mystère pour eux: comment pouvais-je concilier sans conflit mes convictions scientifiques et mes convictions religieuses?
Evidemment, nous n'avons rien inventé: les arguments avaient beau être parfaitement logiques, nous partions d'hypothèses de base différentes - Dieu existe, ou Dieu n'existe pas - et il était impossible de valider, ou invalider, l'une ou l'autre de ces hypothèses dans la limite de notre expérience.
Et de l'autre côté, quand je rentrais le week-end, je tournais en rond. Des confirmants que j'accompagnais me regardaient avec de grands yeux étonnés quand j'essayais d'expliquer que non, la notion de Dieu ne se confine pas à celle du bonhomme à grande barbe planté sur son nuage qui surveille leurs faits et gestes, et qu'il serait temps de s'intéresser au 3ème élément nettement plus abstrait de la Trinité, ce fameux Esprit si difficile à mettre en mots mais que je leur souhaitais tant de rencontrer. Peine perdue? la plupart étaient là parce que leurs parents les avaient envoyés là... la dimension bassement culturelle de la religion me sautait soudain en pleine figure...
J'ai commencé à douter.
Yé une matheuse.
T'avais quand même des gens intéressants autour de toi, si tu pouvais discuter de ces sujets.
Les gens de math pur sont pires que ceux des sciences, pour ce qui est de l'étendue des intérêts.
Bise
Carole
Rédigé par : UneplacepourmoiUneplacepourmoi | jeudi 18 janvier 2007 à 23h23